Le grand succès des deux Quatermass, » The Quatermass Xperiment » en 1954,
et « Quatermass II (La Marque) en 1956,
incitèrent la HAMMER FILMS à se diriger vers le fantastique. Grâce au soutient financier de « United Artists », la firme anglaise connut un très grand succès national. Passant d’un coup d’un seul, de petits films de série B, à des films longs métrages plus adultes. Malgré les censeurs de la BBFC, l’organisme responsable d’évaluer la classification des films, qui les qualifièrent de fatras absurdes, répugnants, et horribles, qualificatifs souvent partagé par de nombreux critiques, notre bonne vieille HAMMER ne se décourage pas,
et décide de continuer dans le sens qu’elle avait choisit. Au départ imaginé en noir et blanc, comme les deux Quatermass,
le prochain film, sera une adaptation de Frankenstein, le personnage crée par Mary Shelley à la suite d’un cauchemar particulièrement horrible. Heureusement des dirigeants de la firme et des co-producteurs américains sentent très rapidement le potentiel d’un tel projet,
et le film est tourné en Eastmancolor. Il fut même question durant un temps d’engager Boris Karloff. Mais « Universal » veille au grain, et l’idée est abandonnée. Les meilleurs des meilleurs de la HAMMER sont choisi pour rejoindre l’équipe technique, TERENCE FISHER à la réalisation,
JIMMY SANGSTER le scénariste, BERNARD ROBINSON comme chef décorateur, JACK ASHER en tant que directeur de la photo, le maquilleur PHIL LEAKEY, et JAMES BERNARD comme compositeur. Tous ces gens devinrent les maîtres de ce qu’on appela, le « Style HAMMER », et participèrent à ce qui devint « L’Âge d’Or de la HAMMER ».
Le film coûta 65.000 livres, et en rapporta 70 fois plus. Ce fut le premier film de la HAMMER à connaître un triomphe international. Par contre le copyright obligea la HAMMER à s’éloigner énormément du maquillage de Jack Pierce pour Boris Karloff, ce qui ne fut que mieux !
Pas de boulons sur le cou! Problème, il reste à trouver les deux acteurs principaux. PETER CUSHING possède déjà une certaine réputation grâce à la télévision, et bien que la HAMMER doute de sa décision, celui-ci est enchanté, et signe immédiatement.
Il sera le baron Frankenstein. CHRISTOPHER LEE de son côté, du haut de ses deux mètres, peu connu encore, signe pour interpréter la Créature.
La relecture du thème est totale, loin du film de James Whale et Karloff. Intitulé « THE CURSE OF FRANKENSTEIN » (La Malédiction de F.), le film sort en France sous le titre parfaitement traduit de l’original, « FRANKENSTEIN S’EST ECHAPPE ». On a le chic pour les traductions et les adaptations!!!
Le film élèvera PETER CUSHING au niveau de star dès la sortie du film. CHRISTOPHER LEE, méconnaissable sous son maquillage, n’est que la star en devenir. Mais chacun s’investit dans son rôle avec passion et ferveur. CUSHING est un Baron Frankenstein prêt à tout pour mener son œuvre à terme, il est Dieu.
Aucune barrière sera assez puissante et robuste pour s’interposer entre Lui et son enfant, sa Créature. Il ne possède aucun sens moral. Seul sa volonté le dirige et dicte ses actes, et le meurtre ne fait pas partie des problèmes susceptibles de l’arrêter.
A contrario, sa Créature est pathétique et fait pitié. Elle est vierge de toute chose. LEE fait bien ressortir ce côté émouvant et triste de son personnage.
Le maquillage de LEE le transforme en une créature bien différente de celle jouée par Karloff.
J’ai toujours été surpris par la confusion commise par le commun des mortel, sur le nom de Frankenstein. Quand on montre une photo de Boris Karloff maquillé en créature du Baron, et que demande son nom, la réponse est toujours la même : Frankenstein.
La tradition populaire à toujours donné le nom du créateur à sa créature, c’est une chose qui m’a toujours surpris… Mais revenons au film, la couleur éclate sur chaque image, on ne voit qu’elle, sa présence est vivante, et permet des débordements sanguinaires écarlates. L’histoire est universellement connue, mais retravaillée : « …Avant d’être guillotiné, le Baron
Frankenstein reçoit dans sa cellule un prêtre à qui il raconte son histoire.
Désireux de dépasser les limites de la science actuelle, il a conçu un être à partir d’éléments de cadavres.
Le corps d’un voleur, les mains d’un sculpteur
et le cerveau d’un savant constituent les différentes parties de ce corps rapiécé, censé représenter l’homme idéal.
Mais la créature, dotée d’une force surhumaine, ne se satisfait pas de sa condition d’esclave à la solde de son inventeur… »
Le rôle principal du film est bien sur le Baron Frankenstein, PETER CUSHING donne noblesse, allant, sympathie, à ce médecin aristocrate pseudo scientifique, dépourvu de principes moraux, et par là même en fait de lui, le monstre du film.
Il réinvente toute la mythologie du thème, à des années lumières de James Whale. « THE CURSE OF FRANKENSTEIN » marque la naissance d’une série de films sur le mythe de Frankenstein, dans lesquels PETER CUSHING incarnera le Baron six fois
sur un ensemble de sept films, la naissance de deux acteurs souvent indissociables, lui et CHRISTOPHER LEE, qui bien des décennies plus tard joueront dans les deux principales sagas de l’histoire du Cinéma, « Star Wars »,
et CHRISTOHER LEE dans « Le Seigneur Des Anneaux ».
Le film marque également la naissance d’un réalisateur, d’un créateur de génie TERENCE FISHER, d’une équipe technique faisant des merveilles et des miracles, et d’une firme dont le nom brille au firmament du 7ème Art, La HAMMER FILMS, synonyme de qualité visuelle,
technique, et créatrice d’un style, d’une esthétique à la fois gothique et victorienne, où chaque détail est pensé avec précision et justesse, d’une véritable identité visuelle.
« THE CURSE OF FRANKENSTEIN » est pour moi le premier Chef d’ Œuvre de la HAMMER. Très audacieux pour son temps, le beau y côtoie le sordide, la bonté l’horreur. FISHER nous plonge dans une époque tourmentée, difficile, où la vie est un combat sans pitié.
Comme je vous l’ai dit à sa sortie, en mai 1957, le film connait un vrai triomphe, et pas seulement en Angleterre, ce qui incite et donne envie à TERENCE FISHER de continuer dans cette voie du fantastique pour notre plus grand bonheur. La HAMMER s’est enfin trouvée, elle vient d’ouvrir une porte par laquelle elle s’engouffre,
et va révolutionner le cinéma fantastique d’horreur et de science fiction.
A très bientôt, pour de nouvelles Histoires Fantastiques de la HAMMER FILMS !!!