Il y a de cela six ans, j’avais consacré un long article sur BLACK SABBATH, et plus particulièrement sur les années DIO. Mais à l’époque je n’avais parlé que très brièvement des deux premiers albums du SABB, nouvelle formule, juste pour vous dire tout le bien que je pensais d’eux. Le temps est venu pour moi de me pencher un peu plus en avant sur ces deux perles rares, véritables pierres précieuses, brillantes de mille feux, qui ne cessent d’illuminer le monde du Hard, et de la musique Rock.
La fin des années soixante dix est difficile pour BLACK SABBATH, rien ne va plus, les deux derniers albums « Technical Ecstasy » et « Never Say Die », respectivement sorti en 1976 et 1978 sont deux flops, ils ne se vendent pas, et plus personne ne semble s’intéresser à eux. Qui plus est, rien ne va plus au sein du groupe, Ozzy ne se sent plus à sa place, et ses meilleurs amis se nomment bouteilles d’alcool et drogues sous toutes ses formes. Du coup, en 1979 il quitte le navire. La voix originelle du SABB s’en va, au grand désespoir d’une partie des fans. TONY IOMMI prend les rennes du groupe en main, afin de le faire repartir de plus belle, et le remettre sur les rails du succès, il croit fermement au groupe, à son pouvoir de renaissance. Et puis en fin de compte, personne n’est irremplaçable.
TONY doit impérativement trouver un nouveau chanteur, quelqu’un qui puisse s’approprier les anciens morceaux du groupe pour les faire sien, et qui puisse aussi apporter un écriture nouvelle pour les textes des chansons. Sans oublier le plus important, avoir une voix, de celle qui vous arrache les tripes, mais qui soit également capable de vous tirer des larmes. C’est d’abord vers David Coverdale que TONY se tourne, mais rapidement un autre vocaliste semble s’imposer, une espèce de magicien, mi sorcier, mi guerrier, l’ancien chanteur de Rainbow, RONNIE JAMES DIO. Il semble être celui qui pourrait apporter du sang neuf et frais à un groupe déjà ancien et dont l’avenir, à l’écoute des derniers albums semble des plus incertain.
Un nouveau contrat est signé avec le manager Don Arden, GEEZER BUTLER, le bassiste, après maintes tergiversations reste dans le groupe, par contre, un claviériste en la personne de GEOFF NICHOLLS fait son entrée. C’est donc cette nouvelle formation qui enregistre en 1980, au Criteria Recording Studio de Miami, sous la houlette de MARTIN BIRCH ( Deep Purple, Rainbow), le nouvel album du BLACK SABBATH qui a pour titre « HEAVEN & HELL ». Et le moins que l’on puisse dire, c’est que le phœnix renaît de ses cendres. Ceux, nombreux, qui avaient annoncé un peu trop tôt la mort du groupe en sont pour leur frais, BLACK SABBATH est de retour avec un album coup de poing, une miracle de Rock Hard, aux connotations « Tolkienisantes », apportées par R.J. DIO, un album qui comptera parmi les plus grandes réussites du genre.
Dès le premier morceau, « Neon Night » le ton est donné. C’est puissant, rapide, on ressent le poids des notes, c’est lourd, mais dans le bon sens du terme, heavy comme le métal, les riffs sont de plomb et entrainent tout sur leurs passages.
Quant à la voix de R.J. DIO, c’est un baume apaisant sur une plaie, le soulagement est immédiat, le chant est magistral, vivant, lumineux et sombre tout à la fois. La qualité de ce premier morceau est d’excellente augure, et laisse présager de merveilleuses choses. Cette formation de BLACK SABBATH contient tous les ingrédients pour une parfaite et complète réussite. « Children Of The Sea » est un petit joyau. Basse et guitare en parfaite harmonie, lancent le titre, dont on sait immédiatement qu’il sera un classique instantané, un moment à part, une parenthèse magnifique.
La voix de RONNIE est splendide, ses intonations créent une ambiance à la fois douce et sulfureuse, nous entrainant dans les méandres de ce fantastique morceau.
Quand le métal se conjugue à la beauté, cela peut donner des moments d’exception comme ce « Children Of The Sea ». « Au matin brumeux, à l’orée du temps, Nous avons perdu le soleil, ultime signal, Tandis que le matin brumeux roule au loin et meurt, Atteignant les étoiles, nous aveuglons le ciel… Nous sommes les enfants perdus de la mer… Regarde, le ciel tombe, Regarde le monde tourne, tourne, tourne, Regarde le soleil devient noir, noir, Regarde, cela ne reviendra plus jamais, jamais ». Le tempo plutôt lent, ajoute à la vision grave du propos, nous sommes responsable de ce qui arrive. Un beau chorus de guitare vient parachever le morceau, première merveille de cet album.
« Lady Evil » comme « Neon Nights » est un bon titre de Hard,
il possède tout ce que l’on est en droit d’attendre, une musique simple et évidente, un chanteur bénie des Dieux, et des musiciens au sommet de leur art. Le sommet du disque arrive avec le morceau suivant, le superbe « Heaven and Hell », « … Le monde est plein de Rois et de Reines, Qui aveuglent tes yeux et volent tes rêves, C’est le Paradis et l’Enfer, Ils te diront que le noir est vraiment blanc, La lune est juste le soleil de la nuit, C’est le Paradis et l’Enfer… »
RONNIE JAMES DIO est à son meilleur, et propulse le morceau vers des contrées inconnues, quant à la musique elle a tout d’une épopée, soutenue par la basse tellurique de BUTLER et la guitare flamboyante de IOMMI.
Un titre pour l’éternité sur un tempo moyen qui allie force, puissance et beauté. Et d’un seul coup, le rythme s’accélère, la musique s’emballe pour un final où la folie prend le pas sur la sagesse, jusqu’à se transformer, s’évanouir sur une guitare acoustique qui amène le morceau à son terme. Quel fabuleux titre, d’ailleurs DIO le conservera tout au long de sa vie dans sa playlist. Ça veut tout dire. « Wishing Well » est dans l’esprit de cet album, une belle base musicale sur laquelle vient se poser une voix unique, sans omettre une basse virevoltante
… »Le temps est un voyage sans fin, L’amour est un sourire sans fin, Faites moi un signe pour construire et rêver… » On est bien loin des images sataniques des premiers albums, on le vérifie une fois de plus avec le morceau suivant, « Die Young » et sa guitare d’introduction qui pleure, avant de s’élancer dans une course folle,
contrariée par son refrain tout en douceur. Un titre à deux ambiances, la folle et la sereine, les deux faces d’une même pièce.
« Walk Away » pas le plus connu des morceaux,
pas le meilleur non plus, mais honnête et dans la moyenne. Un riff de plomb annonce le titre suivant « Lonely Is The Word », qui clôt de belle façon cette belle galette.
La guitare s’en donne à cœur joie et traverse magnifiquement tout le morceau, qui se déroule sous un tempo assez lent, et que vient fleurir la voix de R.J.D. Pour résumer, BLACK SABBATH a pondu un superbe album, en un mot, un Classique intemporel, ensorcelant, imposant son nouveau visage et balayant les concurrents.
R.J. DIO emmène le groupe vers des contrées nouvelles et inconnues du groupe, comme je l’avais dit en son temps, il est le magicien rédempteur, conjuguant murmure et douceur, avec puissance et force, il infuse au groupe une force nouvelle, et donne aux musiciens une envie, et une vigueur qu’ils n’avaient pas connue depuis bien longtemps. Il s’en suit une tournée triomphale, qui aboutie à l’enregistrement d’un nouvel album, mais ça c’est déjà une autre histoire que je vous raconterais bientôt…
Il est à noter qu’en 2012, pour la réédition de l’album en version Deluxe Édition, on aura le plaisir de trouver dans le boitier du cd, un second disque contenant des versions live de différents morceaux, tous enregistrés durant la tournée qui suivit la sortie de « HEAVEN And HELL »