BOB SEGER : « STRANGER IN TOWN ». 1978

La sortie de « Live Bullet » a porté Bob Seger au firmament du Rock. Il n’est plus seulement une star chez lui, dans le Michigan, il a gagné ses galons de Rock star internationale. Pas un pays au monde qui ne reconnaisse son talent de chanteur, auteur, compositeur, interprète. La consécration est mondiale. Springsteen n’est plus le seul « Boss » du Rock’N’Roll, il partage son trône avec Bob Seger. La parution du remarquable « Night Moves » en 1977, participe encore un peu plus à la reconnaissance de Seger grâce à de superbes chansons comme « Night Moves », « The Fire Down Below », et « Mainstreet ». Gros succès commercial aux États Unis, l’album se classe à la quatrième place  du Billboard 100, et s’y maintient durant deux semaines, il reste classé pendant vingt et une semaines. Le 5 mars 1978, Capitol Records sort le dixième album de Bob Seger, « Stranger In Town », second avec le Silver Bullet Band, le succès est immédiat, surtout aux States et en Grande Bretagne, où pour la première fois,

l’album entre dans les Charts anglais. Aux USA, Il entre directement à la quatrième place du Billboard 200, et moins d’un mois après sa sortie, il est certifié « Disque de Platine », et quatre morceaux sont classés au Billboard Hot 100, « Still The Same », « Hollywood Nights », le magnifique « We’ve Got Tonight » et « Old Time Rock’& Roll ». Pour cet album, Seger en plus de son propre groupe,  s’adjoint les services du célèbre Muscle Shoals Ryhthm Section d’Alabama avec Barry Beckett aux claviers, Pete Carr et Jimmy Johnson aux guitares, David Hood à la basse, et le célèbre Roger Hawkins à la batterie. Ceux ci accompagnent Seger sur cinq titres, le Silver Bullet Band participe à quatre morceaux. De nombreux autres musiciens sont également invités par Seger à participer à l’enregistrement, Glenn Frey et Don Felder des Eagles, Bill Payne, qui a participé à tant de groupes que je ne peux tous les nommer, mais pour les principaux Little Feat, Jackson Browne, Bonnie Raitt. Doug Riley alias Dr. Music a participé à plus de trois cent albums, et enfin Howie McDonald très grand guitariste de Blues.

Mais ce n’est pas tout Bob Seger a également engagé un grand nombre de chanteuses pour les chœurs, onze très exactement, que je ne nommerais pas, mais dont vous trouverez aisément les noms. Notre seule et unique star nationale, Johnny Halliday a également craqué sur ce disque, et en a repris quatre chansons. La première quasiment un hymne, en pleine période disco, « Old Time Rock & Roll » devenue « Le Bon Temps Du Rock’N’Roll », adaptée en 1981 par Michel Mallory, et initialement repérée par Sylvie Vartan, la seconde « Brave Strangers » adaptée aussi par M. Mallory et devenue « Comme Des Étrangers » en 1981, « Feel Like A Number » qui devient « Perdu Dans Le Nombre » en 1980, adaptée par Long Chris, et « Still The Same » qui sous la plume de Michel Mallory devient « Toujours Le Même » en 1981. Jean François Chenut dans son livre « Johnny Halliday 60 ans de scène et de passion », raconte que « …Bob Seger avait particulièrement apprécié l’adaptation par Michel Mallory de « Old Time Rock & Roll », et l’avait même encouragé à renouveler l’expérience ». Ce qu’il fera avec d’autres chansons de Bob Seger.

« Stranger In Town » est un splendide mélange de Rock puissant et de ballades sombres, poignantes, mélancoliques, comme Seger sait si bien les écrire. Un seul changement au sein du  Silver Bullet Band, l’arrivée à la batterie de David Teegarden à la place de Charlie Allen Martin, victime d’un accident de la route. Grâce à ce disque, Seger consolide encore un peu plus sa notoriété de géant et d’incontournable du Rock américain et international. On entre tout de suite dans le vif du sujet, avec le premier morceau « Hollywood Nights »,  cavalcade endiablée d’une bande de chevaux sauvages, batterie bien en avant, voix puissante et juste, chœurs bien en place. « Elle se tenait là resplendissante comme le soleil sur cette côte californienne, C’était un garçon solitaire du Midwest, Elle le regarda avec des yeux plein de douceur, Si innocents si bleus, Il a su tout de suite qu’il était trop loin de sa maison,

trop loin de sa maison, Elle prit sa main et elle le conduisit le long de cette plage dorée, Ils ont regardé les vagues mourir sur le sable, Ils ont roulé des kilomètres et des kilomètres, Sur ces routes aux virages sinueux, Toujours plus haut, ils montaient. » Rythme carré et entrainant. La mélodie s’imprime facilement dans la tête, ce premier morceau est une locomotive lancée à toute vapeur.

Rupture de style avec « Still The Same », où Seger nous parle d’un ami qui ne vit que pour les cartes et le hasard, est une merveilleuse ballade countrysante, sombre et mélancolique, aux magnifiques chœurs féminins. « Tu gagnais toujours chaque fois que tu plaçais un pari, Tu étais toujours sacrément bon, Personne ne t’avait encore eu, Chaque fois qu’ils étaient sûrs de tout gagner, 

Tu étais plus rapide qu’ils ne le pensaient, Tu tournais le dos et tu marchais, Tu as toujours dit que les cartes ne te feraient jamais de mal, L’astuce, tu avais dit, c’est de ne jamais jouer trop longtemps. » L’association guitare acoustique piano, apporte une coloration western à cette chanson, amenant un sentiment de tristesse et de regret, avec encore une fois, une mélodie très accrocheuse. Avec « Old Time Rock & Roll » on est sur du très lourd, la chanson a été présenté à Bob Seger par ses créateurs, George Jackson et Thomas Jones, il en a simplement modifié quelques paroles.  « Enlève ces vieux disques de l’étagère, Je m’assiérai pour les écouter seul, Aujourd’hui la musique n’a pas la même âme, J’aime ce rock ‘n’ roll d’autrefois, 

N’essaye pas de me mettre du disco, Tu ne me traîneras même pas sur la piste de danse, Au bout de dix minutes j’aurai déjà pris la porte, J’aime toujours ce rock ‘n’ roll d’autrefois, Ce genre de musique m’apaise l’âme, Je me remémore le passé, Avec ce rock ‘n’ roll d’autrefois ».

Seger est accompagné pour ce titre par le Muscle Shoals Ryhthm Section. Le piano lance l’intro, Seger attaque, suivi par le groupe. On est immédiatement saisi par le groove Rock’N’Roll, et on tape du pied, on connait bien la chanson grâce à Johnny, et c’est un plaisir d’en découvrir la version originale. Seule ombre au tableau, on pourrait lui reprocher d’être bien trop courte. Petite anecdote, « Old Time Rock & Roll » est le second morceau le plus joué dans les jukebox américains. « Till It Shines » reste sur le mode douceur, country. Une des grandes forces de Seger est de savoir alterner ballades et Rock,

avec une facilité déconcertante, à l’instar d’un Bruce Springsteen. La guitare solo est jouée par Glenn Frey. Et toujours cette mélodie imparable. « Feel Like A Number » marque le retour du Rock, sur une belle vitesse de croisière, ça déboule vite et bien, avec un chorus de guitare un peu court, mais bien senti, ce qui est normal, le groupe est une « entité » chacun œuvre pour la communauté,

sans avoir besoin de se mettre trop en avant avec des chorus qui n’en finissent pas. Seger nous parle ici de la classe ouvrière, et de son sentiment de solitude.

 « Je prends ma carte et je fais la queue, Pour gagner un dollar, je fais des heures supplémentaires, Cher monsieur les lettres continuent d’arriver dans le courrier, Je travaille jusqu’à ce que mon dos soit déchiré par la douleur, Le patron ne se souvient même pas de mon nom. » À l’époque on disait, voilà maintenant le premier morceau de la deuxième face. « Ain’T Got No Money » chanson de Frankie Miller, avec Don Felder à la guitare. Un bon Rock, sympa, une fausse fin pour faire monter la sauce, le type de morceau qui fait hocher la tête.

Pas révolutionnaire, mais cool. On arrive maintenant sur un très beau titre, une ballade mélancolique et douce que j’aime particulièrement, et qui voit le retour du Muscle Shoals Ryhthm Section« We’Ve Got Tonite », reprise par un bon nombre d’interprète dont Shirley Bassey, Richie Havens, Barry Manilow, le regretté Jeff HealeyKenny Rogers et Sheena Easton« Je sais qu’il est tard, je sais que tu es fatiguée, Je sais que je ne fais pas partie de tes projets, Nous sommes encore ici, tous les deux seuls, Désirant ardemment s’abriter de tout ce que nous voyons,

 Pourquoi devrions-nous nous inquiéter, personne ne s’inquiètera, Regarde les étoiles au loin, Nous avons ce soir, Qui aurait besoin de demain, Nous avons ce soir Bébé, Pourquoi ne restes-tu pas, 

Au plus profond de mon âme, j’ai été si seul, Tous mes espoirs, se fanent au loin, J’ai une grande envie d’amour, comme tout le monde, Je sais que je continuerais à chercher, même après aujourd’hui, De sorte qu’il soit là, Maintenant nous avons tout, Et nous sommes ici, Que dis-tu, Tous les deux seuls, Nous avons ce soir, Qui aurait besoin de demain, Faisons que ça dure, Trouvons une manière, Eteins la lumière, Viens prendre ma main à présent, Nous avons ce soir Bébé, Pourquoi ne restes-tu pas, Pourquoi ne restes-tu pas ». D’abord piano et cordes, puis la voix, tambourin, basse, de nouveau un bel arrangement de cordes, charleston, puis batterie, le tout dans une extrême douceur. C’est beau à pleurer. Pour le final, des chœurs féminins viennent se joindre à la voix de Seger. Plus j’écoute ce morceau, plus je l’aime. J’espère qu’il en sera de même pour vous. « Brave Strangers » son piano bondissant, frénétique, son entré de batterie, et de nouveau une mélodie imparable, ensoleillée, presque joyeuse,

et d’un seul coup, tout s’arrête, noir total, puis piano basse et saxophone dans une ambiance feutrée, Jazz. Rupture totale, nouveau tempo, nouveau rythme,

un Seger qui s’amuse avec ses musiciens, puis peu à peu, le groupe reprend de la vitesse pour un redémarrage comme au début. Le morceau est original, bien écrit et très bien arrangé, une jolie réussite. Dernier morceau de l’album, « The Famous Final Scene » est un tempo médium, le rythme parfait pour se dire au revoir et à bientôt. Le Muscle Shoals Ryhthm Section y joue sa dernière partition, avec une fois de plus, un bel arrangement de cordes.

Mélancolie et tristesse sont présentes, elles habillent intégralement la chanson. « Tout doit avoir une fin, Comme un océan à un rivage, Comme une rivière à un ruisseau, Comme une rivière à un ruisseau, C’est la fameuse scène finale Comme un invité qui est resté trop longtemps, Maintenant, il est enfin temps de partir, Oui, il est enfin temps de partir Prenez-le calme et serein, C’est la fameuse scène finale. » La mise en place est rigoureuse, chaque musicien connait parfaitement sa partition, et Bob Seger drive ce petit monde comme un chef d’orchestre, avec passion et envie. Une nouvelle pierre à mettre à l’édifice qu’ il construit, et quelle belle pierre. Cet album est une vraie réussite, aucune faiblesse ne vient entacher le tableau. Il démontre une fois de plus sa créativité comme auteur compositeur, et son talent de chanteur.

Le monde du Rock doit dorénavant compter avec Seger. Il n’est pas là par le fruit du hasard, non, sa place il l’a mérité, et l’a gagné à la sueur de ses concerts, à la qualité de ses disques. Et ce n’est pas terminé, les années suivantes, Bob Seger va encore nous pondre de grandes réussites avec des albums comme « Against The Wind », « The Distance », « Like A Rock », et un nouveau monstrueux album live « Nine Tonight », mais ça, c’est encore une autre histoire…

 

 

One thought on “BOB SEGER : « STRANGER IN TOWN ». 1978

  1. Mérat Jean dit :

    Magnifique résumé è un grand merci

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée.